Le Bonheur de Neige

C’était au mois de janvier. Plusieurs centimètres de neige recouvraient les rues de mon quartier, et nous avons décidé ce dimanche-là de rester à la maison, bien au chaud. Je lisais un livre, ma compagne rédigeait des cartes de vœux, mes enfants dessinaient sur la table du salon, leur mamie les regardait, l’œil à la fois fier et chagriné :

Elle leur avait promis de les emmener au manège… Elle était même venue pour ça.Ma grande fille (7 ans) venait de terminer son dessin. C’était un skieur qui dévalait une pente, que seul un être dessiné était capable d’affronter. Elle décida de titrer son œuvre « la piste infernale », et afin d’écrire ces mots comme il faut, elle demanda à sa grand-mère :

– Mamie, comment on écrit « piste ? »

Il faut dire que Mamie est sourde d’une oreille, et entend très mal de l’autre. Aussi elle commença à épeler :

– T…R…I…S…T…E…

Sensible au « message » que cet instant me renvoyait, j’ai décidé de poser mon livre. J’ai pris mes gants, mon écharpe, mon manteau et j’ai demandé à mes enfants d’en faire autant. Leur donnant à chacun un récipient correspondant à leur capacité, je leur ai demandé de le remplir de neige et de venir déposer leur collecte au milieu de la terrasse. Puis de recommencer, afin de former une montagne de neige. Mamie nous regardait à travers la baie vitrée.

Mes trois filles récupéraient la neige du jardin. Mon fils, joignant l’utile à l’agréable, remplissait des seaux en allant se servir sur la voiture. Une demi-heure plus tard, nous avions assez de matière pour construire notre bonhomme de neige. Il faut une sacrée quantité pour le faire. C’est facile en montage, car la neige est abondante, il suffit de brasser. Mais en ville, il faut en remplir des seaux…

Toutefois, la joie d’être ensemble, et l’objectif que nous visions était bien plus forts que les petits tracas et les contrariétés qui jalonnent tout projet. Le fils des voisins, d’abord amusé par le va-et-vient, puis motivé par l’aventure, décida de nous prêter main forte.

Au bout d’une heure, nous avions notre Bonhomme. Il siégeait fièrement au milieu de la terrasse. Assis dans la salle à manger, il nous suffisait de jeter un coup d’œil vers l’extérieur pour le voir afficher un large sourire. Il était temps de retourner au chaud. Mamie, qui avait contemplé notre manège en applaudissant à chaque étape, était aux anges et félicita son petit monde. Elle servit un chocolat chaud à ses petits chéris qui avaient si bien travaillé.

Ma fille se remit à dessiner. Elle décida de reproduire notre œuvre sur papier. Une fois le dessin terminé, elle demanda à sa mamie :

– Mamie, comment on écrit «Bonhomme» ?

Mamie épela doucement :

– B…O…N…H…E…U…R…

C’est ainsi que ce dessin fut intitulé « LE BONHEUR DE NEIGE ».

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