Sur la bonne longueur d’ondes

Tu as certainement déjà entendu, et peut-être même utilisé, l’expression «nous n’étions pas sur la même longueur d’ondes». Illustrons-la grâce à un exemple :

Adam est père de famille. Il traverse une épreuve professionnelle difficile. Lui qui aspire à être très présent pour les siens, n’a pas pu participer aux activités familiales depuis 2 semaines parce qu’il a pris un retard considérable qui risque de porter un coup fatal à sa petite entreprise. Il traverse ses journées de contrainte en contrainte… Ne voyant pas le bout du tunnel.

Après le dîner, il se remet tout de suite au travail. Et alors qu’il termine une analyse complexe sur son tableur, sa femme lui lance :

– Tu te souviens de la dernière fois que tu nous as préparé à manger ?

Adam est bouleversé. Voilà 15 jours qu’il part aux aurores et qu’il rentre tard… Trop tard pour profiter de ses enfants. Trop tard pour faire quoi que ce soit avec ceux qu’il aime. Rien que ce matin, il a failli pleurer, parce qu’un client lui a demandé d’ajouter une option à son devis : option qui lui a coûté 2 heures de travail. Il craque !

Le reproche de sa femme est la goutte d’eau. Il lui répond furieusement :

– Oui ! Je m’en souviens ! Ne fais pas comme si c’était il y a une éternité, tu vois bien que je lutte jour et nuit pour nous sortir de la galère… Si tu vivais le dixième de ce que je traverse, tu serais déjà chez ta psy ! Je dors à peine 5 heures par nuit depuis 10 jours ! Je suis épuisé ! Je ne vois plus les enfants ! Je repousse toute proposition de loisirs d’où qu’elle vienne, et toi, au lieu de me soutenir, tu me reproches de ne plus t’aider ? Je suis venu travailler à la maisos pour sentir ta présence, ton parfum, ta douceur… Mais si c’est pour écouter tes blâmes, je préfère passer la nuit tout seul dans mon bureau !

Sur ces mots, en larmes, il prend son ordinateur portable, arrache la prise avec une violence qui ne lui ressemble pas, et va s’isoler dans son bureau, laissant sa femme médusée.

Parce que sa petite femme (nous l’appellerons Eve) n’émettait pas sur la «fréquence reproches», mais sur la «fréquence Amour». Si son mari avait été sur la même fréquence, voici à quoi aurait ressemblé ce dialogue :

– Tu te souviens de la dernière fois que tu nous as préparé à manger ?

– Oui, j’y pensais encore toute à l’heure… Ça me manque !

– C’était délicieux ! J’aimerais bien que tu me donnes ta recette

– La polenta aux courgettes ?

– Oui… Je vais la préparer pendant que tu termines ton dossier. Demain je prendrai une pause un peu plus longue pour te rejoindre au bureau. Nous pourrons déjeuner ensemble, juste toi et moi. Chaque matin je te vois faire ton sandwich pour manger sur le pouce… J’aimerais t’aider du mieux que je peux. Nous allons traverser cette épreuve ensemble…

Un simple quiproquo ?

Ce n’est qu’un petit quiproquo n’est-ce pas ? Mais certains quiproquos qui devaient se terminer par des galipettes finissent au tribunal, tout simplement parce que l’émetteur et le récepteur ne sont plus sur la même longueur d’ondes, temporairement. Tu pourrais me répondre qu’Eve s’exprime mal ! Qu’il y a une façon plus adroite d’entamer la conversation… Elle aurait pu dire directement :

– Mon Amour, peux-tu me donner la recette de ce délicieux plat aux courgettes que tu nous as préparés il y a 15 jours ?

C’est sûr ! Il y a toujours une meilleure façon de communiquer. Seulement voilà : Eve a toujours communiqué ainsi et sa façon de s’exprimer n’a jamais posé de problèmes à son mari. Mieux encore : c’est cette façon candide d’entrer en matière qui les a mis en contact quelques années auparavant…

Ce qui a changé, c’est l’état mental d’Adam. Après 15 jours d’épuisements divers, sa vision du monde a changé. Quel que soit le sujet de discussion, si son interlocuteur ne prend pas de gants, il se sent critiqué, blâmé, dénoncé… Son état crée une distorsion dans un message qui, dans ce couple, n’a aucune raison de créer du stress… Pour pouvoir entendre l’intention amoureuse qui se trouve dans la question d’Eve, Adam doit s’autoriser à penser que sa femme est toujours amoureuse. Or il n’en est plus vraiment sûr, et quoi qu’elle dise, il se sent accablé. Les messages sont parasités côté récepteur.

Ton exercice du jour

Ce n’est pas vraiment un exercice du jour, mais de tous les jours : lorsque tu as le sentiment qu’un interlocuteur t’agresse, change de fréquence, de longueur d’onde… Donne une chance à la conversation de se poursuivre dans la bienveillance en répondant posément avec humilité, avec humour, avec sagesse, selon ton style… Au pire des cas, s’il s’agit clairement d’une critique, dis-toi que la personne ne comprend pas ton action et a BESOIN d’explication supplémentaires.

Ceci peut intervenir entre collègues, entre mari et femme, ente parents et enfants… Ca arrive tous les jours ! Et la seule personne qui peut changer ça, c’est toi ! En toute proactivité…

A++

Stéphane 

Posted in Semaine 6

5 COMMENTS

Denis - posted on 24 mai 2018 10:00

Bonjour Stéphane.
Dans l’état où il est, comment Adam peut-il prendre le recul nécessaire au changement de longueur d’onde, ou même simplement prendre conscience que son état de stress-surmenage-épuisement l’a déjà mis « out » ? S’il a franchi la ligne dangereuse, qui va le lui signaler : lui, ses proches, les réalités de la vie ?
Y aurait-il un moyen de prévention à ce franchissement de ligne blanche ?

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Stephane - posted on 24 mai 2018 12:20

Oui, il y en a un…

Ce sera la technique de ce jour.

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Technique : «Ce n’est pas possible !» – Aller Vers… Ça m'intéresse ! - posted on 24 mai 2018 18:17

[…] notre article d’hier, Adam entend sa femme lui reprocher de ne plus préparer à manger, puis par extension, de ne plus […]

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Geneviève Rozental - posted on 25 mai 2018 18:48

cet article arrive bien: ce matin, je me suis sentie agressée par mon mari et j’ai répondu sur le même ton alors que j’aurais dû comprendre qu’après une nuit de souffrance, se sentant diminué et en quelque sorte à ma merci, il exprimait une angoisse. Ce que j’aurais dû faire, c’est le rassurer, lui dire que je lui donnais la priorité et que je n’allais pas le laisser tomber. Merci Stéphane, je penserai « longueur d’onde » la prochaine fois pour stopper net le processus d’indignation.

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Fred - posted on 26 mai 2018 04:12

Je fais ça tout seul.

J’ai reçu cette semaine un message me demandant de m’occuper d’une situation. Rien d’inhabituel sinon le fait que cette demande provenait d’une personne qui n’a rien à voir avec la situation. Ma première réaction a été de me dire « mais de quoi elle se mêle celle-là?! » J’ai pris le temp d’évaluer la situation et j’ai réalisé qu’en fait, la personne qui m’avait « irrité » (je mets des guillemets parce que je me suis irrité tout seul) ne cherchait qu’à aider. J’ai donc fait une analyse détaillée de la situation et ai envoyé un bilan à toutes les personnes impliquées démontrant factuellement que tout était déjà sous contrôle. Ça m’a valu des félicitations de mon chef pour « contrôle de soi ». C’est peut-être un détail pour vous, mais pour moi ça veut dire beaucoup. (Petit hommage à France Gall et Michel Berger)

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